Le roi Dagobert Le seigneur Suger Plan 1669 du village de Puteaux intégré à Suresnes Plan 1890 de la ville et du territoire de Puteaux Limites territoriales de la commune de Puteauxpar Jean-Pierre BrutLa commune de Puteaux est située sur la rive gauche de la Seine, à l’ouest de Paris, en un point où la vallée se rétrécit et est dominée par une colline sur les flancs de laquelle s’étagent en amphithéâtre les habitations. Durant le premier millénaire, cette boucle de la Seine qui va de Suresnes à Bougival dépend de la grande abbaye de Saint-Denis. Selon Michel Guillot, historien de la ville de Suresnes, ce n’est qu’en 875 que cette attribution domaniale est faite à l’abbaye Saint-Denis en compensation des pertes subies par le monastère en Normandie après l’invasion des Vikings. En effet, avant cette donation, cette boucle de la Seine appartient au domaine fiscal de Rueil dont les terres sont confiées en 704 à l’abbaye de Saint-Wandrille en Normandie qui connaît les terribles exactions des Vikings le 9 janvier 852 entraînant l’exode de ses moines. Certains croient voir dans une charte du Roi Dagobert de 635 la donation de Puteaux à l’abbaye de Saint Denis. Dans ce document la ville objet de la donation est appelée « Aqua puta ». Cette confusion, née de la traduction littérale, apparaît dans une recherche entreprise par les Dames de Saint Cyr en 1776 sur l’origine de Puteaux. L’Official chargé de ces recherches a trouvé cette charte et a écrit en haut du document « Charte du don fait à l’abbaye de St Denis du village de Puteaux par le Roi Dagobert », il a souligné « Aqua puta » et a écrit en marge « Puteaux ». Actuellement les historiens, dont Michel Guillot, en doutent. Aqua puta signifiant « eau pure », ils pensent que cette donation concerne la ville « d’Eaubonne ». Jusqu’à la Révolution Française, les limites territoriales de Puteaux vont se confondre avec son histoire paroissiale, d’où l’intérêt de retracer cette histoire. Le premier texte connu mentionnant le nom de la ville date de sa fondation décidée par l’abbé Suger en 1148 « Villa nova in loco qui vocatur Putiauz ». Cette date de fondation se situe un an après l’ouverture du bac de Neuilly par l’abbé Suger. On peut y voir une conséquence dans la mesure où il a dû penser que ce bac allait générer une activité plus importante sur l’autre rive de la Seine. Le Seigneur Suger, abbé de l’abbaye de Saint Denis, est chargé par le Roi Louis VII le Jeune de réorganiser le Royaume. Au moment de cette fondation de Putiauz, il est Régent du Royaume en l’absence du Roi parti conduire avec Conrad III, roi germanique qui règne sur le Saint Empire, la deuxième Croisade de Saint Bernard de Clairvaux de 1147 à 1149. Suger crée plusieurs autres villes nouvelles dont Carrières-sur-Seine, Vaucresson, Villeneuve-la-Garenne et bien d’autres. Il s’attache à mettre en valeur les terres délaissées ou possédées sans titre par des seigneurs de la noblesse d’épée. La création de ces villes nouvelles a pour but d’attirer des populations actives pour cultiver ces terres. Pour favoriser ce peuplement, il n’hésite pas à donner aux habitants de Putiauz des privilèges non négligeables : l’amende pour délits ordinaires est plafonnée à 12 deniers, ils sont exemptés de toute taille, ils n’iront à l’ost qu’en sa présence, ils ne répondent en matière de justice qu’à lui ou à son sergent qui demeure dans la ville. En revanche, pour les délits graves, ils ne peuvent se prévaloir d’aucun privilège : Fait à Saint-Denis l’an du Verbe incarné mil cent quarante huit ; sceau de Guillaume, prieur et infirmier, de Guillaume préchantre, sceau de Godefroi, trésorier et sceaux de quantité d’autres. » Ce nom de « Putiauz » cité par l’abbé Suger pour désigner cette ville nouvelle dans un texte en latin du XIIe siècle, provient, selon M. Jacques Loillieux, en vieux français, d’une forme de « putel », nom commun dont le sens est « bourbier », « marécage », nom tombé dans l’oubli au XVe Siècle. Michel Guillot, l’archiviste historien de Suresnes, nous précise que Putiauz est un toponyme roman confirmant, dit-il, l’étymologie fournie par M. Roblin que Puteaux est en vieux français le synonyme de bourbier. Au XVIe Siècle, l’abbé Leboeuf, qui a écrit une « Histoire des Environs de Paris », prétend que Puteaux est tiré du latin « puteoli ». De fait, les textes en latin qui ont suivi, rédigés par des clercs qui ont voulu latiniser le nom de la ville comme cela se faisait traditionnellement, mentionnent « puteoli », pluriel de « puteolus » signifiant « petit puit » ou « point d’eau ». Dès le XVIe ou XVIIe Siècle apparaît le nom de « Puteaux » dans tous les textes rédigés en Français. L’origine du nom de la commune n’est pas étrangère à ses limites territoriales. Le nom de Puteaux synonyme de bourbier ou marécage correspond à l’état des berges de la Seine à cette époque en ce site et probablement jusqu’à son assainissement pour faire de ce marécage des terres riches. Alfred Lefeuve dans son annuaire de 1857 nous raconte qu’au XVe siècle Puteaux n’était qu’un tout petit hameau dépendant de Suresnes. On prétend qu’à cette époque, dit-il, il n’y avait ni caniveaux ni même de ruisseaux pour l’écoulement des eaux fluviales et ménagères, en sorte que ces eaux croupissaient et sentaient très mauvais ; et les voyageurs de dire, en parlant de ce pays : les eaux puent, et de là, dit-on, puent-eaux, ensuite Puteaux. Nous savons que la paroisse de Puteaux est rattachée à Suresnes en 1070, dès son érection en paroisse. Ses habitants deviennent paroissiens de l’église Saint-Leufroy de Suresnes. Avant cette date, selon l’abbé Albert Machuel, auteur d’une rubrique intitulée « Puteaux des anciens jours » (rubrique de « La vie Paroissiale de Puteaux » parue de 1933 à 1938) : « Au XIe Siècle le petit hameau de Puteaux fut détaché de Nanterre pour être agrégé à Suresnes qui venait d’être érigé en paroisse ». Il est vrai que Nanterre est déjà un centre religieux important. Sainte Geneviève y naît en 422 et y passe sa jeunesse, elle y rencontre en 429 Saint Germain, évêque d’Auxerre, il est accompagné de Saint Loup, évêque de Troyes. Ils font étape à Nanterre avant de se rendre en Grande Bretagne afin d’y combattre l’hérésie pélagienne. Leur rattachement à la paroisse de Suresnes les rend « tributaires de l’abbaye de Saint-Germain-des-Prés (de Paris) au point de vue paroissial dont les religieux étaient depuis le Xe Siècle Seigneurs de Suresnes » nous dit l’abbé Machuel. Les habitants de Puteaux sont donc tributaires de deux abbayes, celle de Saint-Denis pour le temporel et celle de Saint-Germain-des-Prés pour le spirituel. En 1776, cette dépendance temporelle est précisée par l’official du Roy à Paris chargé par les Dames de Saint-Cyr de faire des recherches historiques, en marge d’une charte de 1248 de l’abbé de Saint Denis : « charte de Guillaume, abbé de Saint-Denis qui affranchit les habitants des villes neuves de Gennevilliers, Asnières, Courbevoie et Puteaux de capitage, mortemain et autre servitudes excepté le droit de pâturage et autres qu’ils doivent à ladite abbaye, ce qui marque la Haute Justice de l’abbaye de Saint-Denis sur ces lieux ». En 1509, les paroissiens putéoliens adressent une requête à l’abbé de Saint-Germain-des-Prés, Guillaume Briçonnet, évêque de Lodève, fils d’un ancien Premier Ministre de Louis XII, pour avoir l’autorisation d’édifier une chapelle. Mais ce n’est qu’en 1519 que cette autorisation leur est accordée en ces termes : En 1573, nous rapporte l’abbé Leboeuf, historien du diocèse de Paris, les putéoliens obtiennent quelques aménagements par sentence de l’Official de Paris : la chapelle est érigée en succursale (un premier pas vers l’indépendance) de la paroisse de Suresnes. Le texte est précis : le Cardinal de Noailles ordonne le 2 décembre 1716 une enquête circonstanciée commodo et incommodo suivant la forme du droit, au sieur Dorsanne, prêtre, docteur en théologie de la faculté de Paris, chanoine de l’Eglise de Paris, official ordinaire. Celui-ci convoque toutes les parties – les sieurs Curés, Marguilliers, habitants et autres intéressés - pour les entendre le 29 décembre 1716 à huit heures du matin en son hôtel. A la suite de cette enquête, le Cardinal de Noailles prend la décision le 16 août 1717 d’ériger l’église de Puteaux en paroisse. Messire de Cay, prêtre, arrivé en septembre 1711 comme vicaire « amovible », est nommé sur place Curé de la paroisse de Puteaux. Il reste curé de cette paroisse 29 ans. La séparation entre les deux paroisses de Puteaux et Suresnes qui n’en faisait qu’une jusque là, est fixée à la Croix de Puteaux. Elle se situe actuellement rue de Verdun, entre la rue des Bas Rogers et l’avenue George Pompidou. La paroisse nouvellement érigée comprend donc : une zone d’habitations dans le bas de Puteaux, des coteaux plantés de vignes et l’île de Puteaux qui lui sont rattachés. La nouvelle paroisse va du pont de Neuilly au château de Penthièvre. Enfin reconnue indépendante de Suresnes, les limites territoriales de Puteaux fixées en 1717, sont celles que nous connaissons aujourd’hui. Le territoire de Puteaux est l’un des plus petits des communes environnant Paris. Sa contenance est d’environ 319 hectares. Ses limites sont au levant, la Seine y compris l’Ile de Puteaux et Neuilly sur l’autre rive, au couchant Nanterre, au midi la commune de Suresnes et au nord la commune de Courbevoie. Les bords de Seine lui donnent un bel aspect, l’Ile est arborée, de l’autre côté de la commune, la colline de Chante-Coq offre des vues splendides sur Paris embrasant un grand espace. En 1857, Alfred Lefeuve, auteur de l’annuaire de Puteaux (administratif, industriel statistique, commercial) écrit : cet espace « qu’embellissent les champs de rosiers » « Tout cet ensemble fait de Puteaux un séjour on ne peut plus agréable, qui charme les yeux et réjouit l’esprit. » C’est donc en 1717 que Puteaux, érigé en paroisse distincte de Suresnes, lui vaut de devenir une commune pleine et entière à la Révolution, les paroisses seules ayant ce privilège. En 1787, deux ans avant la Révolution, une organisation administrative avait été établie avec départements, arrondissements et chefs-lieux de municipalités. Durant cette période qui dura trois ans, Puteaux fut une municipalité de l’arrondissement de Corbeil. L’Assemblée Nationale, en constituant à la fin de 1789 la carte administrative de la France, ne tient pas compte de ces divisions et Puteaux est attribué au district Nord du département, district de Saint-Denis et au canton de Nanterre. Directoire du District de Saint-Denis Vu le rapport fait par les sieurs commissaires, MM Bailly et Noël, de l’avis de M. Pharoux duquel il résulte qu’entre Puteaux et Suresnes il y a lieu à délimitation ; Cette délimitation est encore en vigueur. La ruelle entre les propriétés de MM. Faventine et de l’Orme est actuellement la rue Georges Pompidou après s’être appelée successivement ruelle au Prince, rue des Grands Jardins, rue de Penthièvre, et rue Keighley ; Cette délimitation fixe la limite administrative entre les communes de Puteaux et de Suresnes, les limites avec les communes de Nanterre et de Courbevoie sont celles de la paroisse de Suresnes dès son érection en 1070 et n’ont pas changé depuis. Sources
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